🗳️ Élections en Roumanie – Analyses Géopolitiques & Intelligence Economique

Les élections en Roumanie en 2024 ont révélé une fragmentation politique significative, avec des implications notables pour la géopolitique régionale et européenne. Dans un premier temps, prenons le temps de revenir sur le contexte des principaux scrutins.

Élections européennes (6-9 juin 2024) :

Au mois de juin, des élections locales ont eu lieu dans le même temps que le scrutin européen, eclipsant ce dernier au profit des attentes de terrain.

Cependant, lors des élections européennes, l’alliance entre le Parti social-démocrate (PSD) et le Parti national libéral (PNL) a obtenu environ 45 % des voix, consolidant leur position au sein du Parlement européen. Cette coalition, regroupant les principaux partis pro-européens roumains, a démontré une stabilité notable face à la montée des mouvements nationalistes dans d’autres États membres.

Néanmoins, le parti d’extrême droite Alliance pour l’unité des Roumains (AUR) a réalisé une percée significative, envoyant pour la première fois des représentants au Parlement européen. Bien que leur score ait été inférieur aux prévisions, cette entrée marque un tournant dans la représentation politique roumaine au niveau européen.

Élections régionales :

Les élections régionales de septembre 2024 ont vu l’alliance PSD-PNL (Parti national libéral) arriver en première position avec 48,70 % des voix. Cette coalition, qui gouverne ensemble depuis 2021, a consolidé sa position au niveau local, bien que des partis d’extrême droite, tels que l’AUR, aient également réalisé des percées notables.

Élections législatives :

Les élections législatives du 1er décembre 2024 ont abouti à une assemblée nationale fragmentée, avec sept partis représentés. Le Parti social-démocrate (PSD) est arrivé en tête avec 22,3 % des voix, suivi par l’Alliance pour l’unité des Roumains (AUR), un parti d’extrême droite, qui a obtenu 18,3 %. Cette configuration a renforcé le clivage entre les partis euro-atlantistes et souverainistes, ces derniers représentant désormais plus de 30 % des sièges

Élection présidentielle (24 novembre et 8 décembre 2024) :

Le premier tour de l’élection présidentielle, tenu le 24 novembre 2024, a été marqué par la surprise de la qualification de Călin Georgescu, un candidat indépendant pro-russe, qui a obtenu 22,94 % des voix. Il a été suivi par Elena Lasconi (USR) avec 19,18 % et Marcel Ciolacu (PSD), Premier ministre pro-européen, avec 19,15 %.

Toutefois, entre les deux tours, la Cour constitutionnelle de Roumanie a annulé l’élection présidentielle, invoquant des suspicions d’ingérence étrangère, notamment russe, dans le processus électoral et invoquant l’utilisation de TikTok par Georgescu pendant sa campagne.

La juridiction a « annulé la totalité » du scrutin afin de « s’assurer de sa validité comme de sa légalité », et demande à ce que « l’intégralité du processus électoral » soit reportée (Le Figaro). Cette décision a entraîné le maintien en fonction du président sortant jusqu’à la tenue d’un nouveau scrutin à une date ultérieure.

Analyse

La montée en puissance de l’extrême droite, notamment l’AUR et le candidat pro-russe Călin Georgescu, indique un glissement vers des positions plus nationalistes et eurosceptiques en Roumanie. Cette évolution pourrait remettre en question l’engagement traditionnel du pays envers l’Union européenne et l’OTAN, des institutions qu’il a rejointes en 2007 et 2004 respectivement. Une telle orientation pourrait affecter la stabilité régionale, notamment en ce qui concerne la guerre en Ukraine, où la Roumanie a joué un rôle clé en tant que membre de l’OTAN et en fournissant un soutien logistique et humanitaire.

En outre, la fragmentation politique interne pourrait compliquer la formation d’un gouvernement stable, affectant ainsi la capacité de la Roumanie à mener une politique étrangère cohérente. Les tensions entre les partis pro-européens et les partis souverainistes pourraient également influencer les relations de la Roumanie avec ses voisins, notamment la Moldavie, et son rôle dans les initiatives régionales en Europe de l’Est.

En somme, les élections de 2024 en Roumanie ont révélé une dynamique politique en mutation, avec des implications potentielles pour la position géopolitique du pays en Europe de l’Est et au sein des institutions euro-atlantiques.

Sources :