Semaine du 29 janvier au 4 février 2023
Pêcheurs, dauphins et intelligence économique
Quels liens y a-t-il entre ces trois termes ? Une compréhension de l’interdiction de naviguer, décidée par une instance française, le Conseil d’État et contraignant une partie de notre flotte de pêcheurs de rester à quai. Ce qui arrive aux pêcheurs aujourd’hui peut arriver à n’importe quel autre secteur d’activité économique ou entreprise.
Les faits
Par arrêté du 20 mars 2023, le Conseil d’État avait donné ordre au gouvernement de fermer pendant 6 mois des zones de pêches dans le Golfe de Gascogne aux bateaux de 8 mètres et plus afin de protéger les dauphins communs, les grands dauphins et les marsouins communs susceptibles d’être victime de captures accidentelles lors des campagnes de pêches, et ce pour être en conformité avec des obligations du droit européen et d’une directive de 1992. Au mois d’octobre dernier, le secrétaire d’État à la pêche a émis une interdiction pour 4 semaines (au lieu de 6 mois demandé) pour 2024, 2025 et 2026. En réponse, le 22 décembre dernier, le Conseil d’État saisi en référé par des associations environnementales a suspendu ces dérogations pour nos pêcheurs français qui seraient de facto interdit de pêche pour 6 mois (à suivre)…
Mais encore …
J’imagine qu’à cet instant Flipper le dauphin, l’ami des plus de cinquante ans et plus, fait de magnifiques sauts en arc de cercle entre votre cerveau droit et gauche et que vous l’entendez même discuter avec Sandy et Porter Ricks. Et voilà quel magnifique biais émotionnel qui provoque en nous une distorsion de la réalité et des connaissances et perturbe la prise de décision. Certains savent très bien s’en servir à des fins de manipulations de masse… Néanmoins, ce biais ne permet pas aujourd’hui à près de 500 pêcheurs d’effectuer leur métier, et ce jusqu’au 24 février quand les pêcheurs espagnols et autres sont eux dans cette zone qui s’étend de la côte nord de l’Espagne à la Bretagne.
Ce dilemme entre émotion et profession, émotion et réalité économique est une situation que tout entrepreneur peut rencontrer. En l’occurrence, cette situation a été déclenchée par un groupement d’associations et une ONG. Que vous soyez dans le BTP, l’agriculture, l’industrie, qui n’a jamais eu à faire à une partie prenante de la société civile sortie de la “boîte comme un diable” ?
Mais qui sont donc ces associations et ONG ?
Dans notre affaire, il y a 4 parties prenantes : l’ONG (Organisation Non Gouvernementale) SEA SHEPHERD, les associations France Nature Environnement (FNE), Défense des Milieux aquatiques (DMA) et la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO).
- Qui sont-elles ?
- Quels sont leurs acteurs ?
- Comment sont-elles financées ?
- Quels sont leurs partenaires clés ?
- Quels sont leurs agendas ?
- Comment cartographier le maillage de leurs relations ?
- Qui est l’idiot utile dans l’affaire ?
- ….
Voilà où je veux en venir : comment se protéger et en cas d’attaque se défendre avec son cerveau et non ses muscles ? Les outils de l’intelligence économique reposent sur la veille, la sécurité, l’influence et la stratégie. Les utiliser à bon escient peut éviter de rester à quai pendant plusieurs semaines quand d’autres agissent sous votre nez ! Cela prend un peu de temps, mais le temps nous le savons c’est de l’argent, reste à savoir si vous préférez d’éventuelles subventions ou de l’actif.
Après nos agriculteurs, nos pêcheurs, à qui le tour ?
Notre carte vitale est chez les Américains !
Manifestement, marcher sur la tête ne donne pas mal aux cheveux pour nombre de décideurs !
Bienvenue aux pays des Bisounours !
Dans une décision du 21 décembre 2023 publiée le 31 janvier 2024 sur Légifrance, la Commission Nationale de l’Information et des Libertés (CNIL) autorise le stockage de données de santé chez Microsoft Ireland Operations ltd, et ce dans le cadre du projet Health Data Hub et EMC2.
En effet, il s’agit de collecter et d’étudier toutes les données de l’Assurance Maladie, des données fournies par 4 grands hôpitaux français, et ce pour une durée de 3 ans dans le cadre d’une expérimentation des traitements de masse des données par des chercheurs. L’objectif de ce projet est de faire avancer la recherche pharmaco-épidémiologique sur les effets à long terme de traitements médicaux. L’intention est louable, mais comme d’habitude, le diable se cache dans les détails. La société Microsoft est américaine et quand bien même les données seront stockées en France, celles-ci dans un cadre technique peuvent se retrouver outre-Atlantique.
Souveraineté, vous avez dit souveraineté ?
La multiplication des technologies numériques oblige les États à se protéger. Les premiers à l’avoir fait sont les États-Unis d’Amérique avec entre autres le Cloud Act. L’administration américaine s’arroge le droit de demander la saisie de toute donnée stockée dans un cloud américain. De son côté, l’Europe, toujours à la pointe de la normalisation, positionne son RGPD et à compter du 17 février 2024, son Digital Act composé du Digital Service Act et du Digital Market Act qui rentreront en application.
L’affaire de ce stockage date de 2020 lorsque les appels d’offres pour ce projet ont été lancés. Octave Klaba, fondateur d’OVH, s’était alors battu pour que les données des assurés soient hébergées par une structure française et non pas Microsoft. En vain…
Quand bien même la CNIL rappelle à bon droit que “les données stockées par un hébergeur soumis à un droit extra-européen peuvent être exposées à un risque de communication à des puissances étrangères”, les faits sont têtus, les Américains seront en possession de nos données médicales au motif que ni en France ni en Europe aucune entreprise ne pouvait le faire. En est-on bien sûr?
Voilà comment être soumis au risque d’application de lois américaines à portée extra-territoriales, concept inventé par les juristes américains dans les années 70. En relations internationales, rappelons s’il le fallait, qu’il n’y a pas d’amis, juste des alliés et encore. Quelle est donc notre visibilité à 2025 si le locataire de la Maison-Blanche change pour un électron libre ? Cela dit, nos hauts-fonctionnaires auraient pu choisir AliBaba…
Cette question de la gestion des données sensibles est vitale tant pour nous particuliers qu’entreprises puisqu’elles sont notre actif souvent monnayé par plus fort que nous. Il convient donc de les protéger sérieusement et de sensibiliser chacun d’entre nous à leur protection.
L’intelligence économique c’est aller chercher l’information stratégique nécessaire aux acteurs économiques et révéler les menaces cachées.