Que retenir d’autre de la semaine du 4 au 10 décembre ?
Vladimir Poutine de MBZ à MBS
Selon nos médias mainstream, il y a quelques mois à peine, Vladimir Poutine était à l’agonie, du moins au bord de l’abîme.
Pourtant, malgré un mandat d’arrêt de la Cour Pénale Internationale (CPI), Poutine voyage imperturbablement au nez et à la barbe des Occidentaux. Après le Kirghizstan et la Chine au mois d’octobre, le 6 décembre 2023, il débarquait en “grandes pompes” à Abou Dabi, accueilli avec tous les honneurs par Mohammed Ben Zayed (MBZ), avant de s’envoler vers Ryad. Là encore, tapis rouge déroulé et rencontre avec Mohammed Ben Salman (MBS) pour des discussions sur les sujets énergétiques. Si le monde des relations internationales évolue, les alliances se recomposent au gré de partitions opportunistes, dans l’indifférence des considérations de l’hégémon américain, devenu fantomatique.
Les accords de Quincy appartiennent à une autre époque, et l’émancipation géopolitique de l’Arabie Saoudite et des pays du Golfe se moque des desiderata occidentaux. Dans cette tectonique de plaques, la Russie occupe une place centrale dans l’écriture d’une nouvelle partition, sous les yeux vides de sens stratégique de l’Union Européenne et des États-Unis.
Aujourd’hui, Poutine tire profit des difficultés occidentales pour réaliser de nouvelles percées stratégiques dans des sphères d’influence autrefois réservées aux Occidentaux, avançant ses pions tant sur l’échiquier diplomatique qu’économique.
A ce propos, sur le plan économique, où en est la Russie ? Début 2023, le Fonds Monétaire International (FMI) prévoyait une croissance de 0,3%, révisée à +1,5% en juillet et +2,25% en octobre, tandis que pour la zone euro, il vient de la réduire à 0,7%. Bien sûr, arguerez-vous, les conditions diffèrent : la Russie est en guerre et sous sanctions, alors que nous sommes en paix et les imposons. Qu’en penser ?
C’est où l’Essequibo ?
L’Essequibo, une région du Guyana située entre le Venezuela et le Suriname sur la côte Atlantique de l’Amérique du Sud (carte ci-après), est actuellement le théâtre de tensions géopolitiques. Georgetown, la capitale du Guyana, se trouve à environ 600 km de la Guyane française, collectivité territoriale de la République Française régie par l’article 73 de la Constitution. Malgré cette situation de voisinage, l’attention de la classe politique et des médias mainstream français est absorbée par d’autres événement tels que le énième 49.3 en préparation, la guerre en Ukraine et le conflit entre Israël et le Hamas, et personne ne regarde dans la direction de l’Ouest où une nouvelle saison de “ce qui est à moi est à moi et ce qui est à toi est à moi” s’écrit sous le plume de l’inamovible Nicolas Maduro, comme un mauvais remake des saisons précédentes orchestrées par Vladimir Poutine.
Pour comprendre ce qu’il se passe, une fois encore, il faut reconvoquer l’Histoire. Cette situation délicate remonte au XIXe siècle lorsque le Royaume-Uni, ayant acquis la région par traité avec les Pays-Bas en 1814, a redéfini la frontière via l’explorateur Robert Schomburgk, revendiquant ainsi 80 000 km². En 1899, la Cour d’arbitrage de Paris a tranché en faveur des Britanniques dans un différend territorial, mais des révélations en 1949 sur des pressions exercées par les Britanniques sur la cour ont ravivé le contentieux.
La controverse historique a ressurgi en 2015 avec la découverte pétrolière d’Exxon Mobile, intensifiant les tensions entre le Guyana et le Venezuela dans la région de l’Essequibo. Mais dans le marasme vénézuélien de ces dernières années, l’Essequibo était passé après les nécessités de survie du quotidien des Vénézuéliens. Jusqu’à ce que Nicolas Maduro organise un type de distraction déjà vu ailleurs : on réveille un litige, on organise un référendum, on mobilise des troupes … Tant qu’à faire, après tout le Vénézuela est exsangue et les prochaines élections présidentielles ont lieu au deuxième semestre 2024…
Cette affaire, contraire au droit international et à l’intangibilité des frontières, pourrait avoir de sérieuses répercussions. La situation dans la région de l’Essequibo mérite, de la part de nos dirigeants, une attention plus approfondie pour éviter toute escalade potentiellement préjudiciable sur le plan géopolitique. La distance de 636 km entre Georgetown et Kourou souligne l’importance géostratégique de cette question.
Le Monde. Tensions entre le Venezuela et le Guyana autour d’une région riche en pétrole. 11 décembre 2023
Quelle est notre mémoire sur la catastrophe de Bhopal.
L’accident de Bhopal, capitale du Madhya Pradesh en Inde, eut lieu dans la nuit du 2 au 3 décembre 1984 et fut l’une des pires catastrophes industrielles de l’histoire.
La catastrophe de Bhopal met en lumière les défaillances graves dans la gestion des risques industriels de l’usine de pesticides d’Union Carbide. La substance chimique libérée, le gaz isocyanate de méthyle, a entraîné la mort de milliers de personnes et des effets à très long terme sur la santé des survivants et des générations suivantes. Des lacunes dans la formation du personnel, l’entretien des équipements et les procédures d’urgence ont contribué à la fuite du gaz toxique. L’absence de systèmes de détection adéquats et l’insuffisance des mesures de sécurité ont aggravé la situation. Cette tragédie souligne l’importance cruciale d’une gestion rigoureuse des risques dans les industries pour prévenir de telles catastrophes.
39 ans plus tard, qu’en est-il du quotidien des habitants de cette ville ? Bhopal porte à jamais les stigmates de l’accident, mais pis encore, les conséquences sanitaires sur les survivants et générations qui ont suivies et qui vont suivre. Il n’y a jamais eu de décontamination des installations et par conséquent les sols, la faune et la flore continuent d’être fortement pollués dans la zone du désastre. En 2023, les gens meurent de cancers et de maladies respiratoires en très grand nombre et les enfants naissent avec des malformations cardiaques et/ou cérébrales et rien n’est fait pour aider cette population au point de faire dire à certains survivants que ceux qui sont morts dans les heures suivantes de la fuite de gaz ont eu de la chance. C’est dire à quel point de gravité nous sommes en 2023.
Nous le savons, le peuple ne fait jamais partie des variables d’ajustement, il est une constante dans les façons dont les Etats le traitent. Alors que la COP 28 de Dubaï touche à sa fin, l’impression persiste que la protection de l’environnement et la préservation de la planète ne sont pas simplement des préoccupations des nations aisées, mais plutôt une question liée à une perspective occidentale, souvent perçue comme trop préoccupée par les responsabilités sociétales et environnementales déchargeant parfois leurs obligations sur des actions visant à éloigner les déchets de notre vue.