Une journée d’élection dans un bureau de vote
En France, on n’ouvre pas un bureau par magie
Tout gouvernant dans notre pays devrait passer pas la case “tenue de bureau de vote” avant de se lancer dans une élection ou d’en déclencher une à l’envie. Notre démocratie est ainsi faite, il y a des hommes et des femmes qui le dimanche d’élection sont présents de 7h30 à 22-23heures pour le bon déroulé du scrutin. Certains sont rémunérés, comme le personnel administratif détaché par la commune, beaucoup d’autres bénévoles comme les assesseurs, délégués et scrutateurs.
Petit problème d’arithmétique :
Depuis quelques années, certains de nos dirigeants appartiennent à des gouvernements sans jamais avoir eu un mandat électif, donc sans être passé par la case élection et tenue de bureau de vote. Cela dit, du haut de leur arrogance technocratique ils auraient vite fait de vous faire comprendre que vous ne comprenez rien et qu’ils vont vous expliquer …
Quand un travail de refonte des listes électorales a été opéré, les communes ont dû réorganiser leur carte géographique des bureaux de vote afin que ces derniers ne dépassent pas 1000 électeurs par bureau. Ainsi, dans ma commune, il y a 50 bureaux de vote pour un peu plus de 46000 électeurs. Un bureau est composé d’un secrétaire et d’un ou deux assistants (faisant partie du personnel administratif), d’un président (souvent un maire adjoint ou un conseiller municipal) et de 2 assesseurs minimum. Ces derniers sont désignés par les candidats ou sont volontaires sous l’étiquette “assesseur citoyen”. A cela s’ajoutent des délégués des listes candidates ( qui ont pour fonction de contrôler les déroulements des opérations de vote jusqu’au décompte des voix) et les représentants de la commission de contrôle des opérations de vote (chargée de vérifier la régularité de la composition des bureaux de vote et des opérations électorales).
Pour ces élections, nous avions 38 listes, donc il y aurait dû avoir 2 assesseurs (un titulaire et un suppléant) multipliés par 50 bureaux pour notre commune. N’hésitez donc pas à faire le calcul pour votre ville… Il est louable de vouloir présenter une liste, c’est encore mieux si l’on pourvoit aux matériels et bénévoles qui doivent aller avec.
Le matériel, justement. Sur nos 38 listes des Européennes, un certain nombre de leurs représentants n’ont pas dû non plus souvent mettre les pieds dans un bureau de vote. Demander à l’électeur d’imprimer son bulletin qui pour être valide doit être “imprimé au format A4, en paysage, recto verso si nécessaire, sur du papier d’un grammage de 70g/m2 et avec une encre d’une seule couleur”1. Mais bien sûr … parce que tout le monde dispose d’une imprimante chez lui et la fracture numérique n’existe pas, c’est bien connu. Dans l’exemple de ma commune, 12 listes avaient fourni suffisamment de bulletins, 13 avaient fourni un nombre inférieur au nombre d’électeurs inscrits et 13 listes n’avaient rien fourni du tout.
Humilité et patience
Tenir un bureau de vote comme assesseur, c’est être patient et faire preuve d’humilité. Respecter le personnel administratif, le code électoral, l’organisation générale et attendre l’électeur. Dans nos démocraties, il y a des pays où la participation ne se discute pas et d’autres où l’abstention sent bon le parfum de la pêche à la ligne. La France fait, malheureusement, partie de cette deuxième catégorie, puisque nous sommes toujours bien heureux d’avoir une participation de 51,49%.
Humilité, car il faut expliquer, réexpliquer aux citoyens le parcours à suivre dans le bureau avec les règles incontournables : passage par la table de décharge (où le personnel administratif vérifie la qualité d’électeur dans le bureau), puis par l’isoloir (seul(e) parce que le vote est secret et confidentiel) puis par les assesseurs pour la vérification de l’identité (on présente une pièce d’identité et sa carte d’électeur) de chaque électeur, le vote auprès du Président et enfin, la signature sur la liste d’émargement.
“A voté !” et ensuite ?
Ensuite, les heures s’égrainent jusqu’à la fermeture du bureau (18h en province, 20h dans les grandes villes) avec nos incessantes demandes de bénévoles pour être scrutateur et nous permettre un bon déroulement du dépouillement et son lot d’anecdotes, de quoi écrire un ouvrage sur les pérégrinations électorales. Pour les scrutateurs, de nouveau petit calcul : si nous avons 1 isoloir pour 300 électeurs, et un bureau avec 3 isoloirs, sachant qu’il faut 3 tables de 4 personnes, de combien ai-je besoin de personnes qui passeront la soirée avec nous ?
Quand le bureau ferme, la pression monte : les émergements seront-ils égaux aux nombres d’enveloppes, on compte, on recompte voire on re-recompte. On prépare les fameuses “enveloppes de 100” pour les tables de scrutateurs à qui on explique le déroulé : un premier ouvre l’enveloppe, un autre déplie le bulletin et annonce quand les deux autres pointent (d’où 4 personnes). Et les additions doivent être justes pour pouvoir communiquer les résultats et les annoncer !
Faire vivre la démocratie ne se fait pas tout seul. Vous comprenez donc que pour les législatives anticipées il va falloir beaucoup de bénévoles !! Merci de faire passer le message.
- Commission nationale de propagance ↩︎