Ça gronde chez les agriculteurs
Dans le premier épisode du “pas de côté”, le 4 décembre, je reprenais le nouveau slogan des jeunes agriculteurs “on marche sur la tête” et expliquais la situation de ceux qui nous nourrissent.
Plus d’un mois après, pour des raisons différentes, mais le fond de la crise est le même, les agriculteurs européens se mobilisent (enfin) contre cette logique normative pseudovertueuse de la technocratie européenne. L’Union européenne (UE) est un modèle de normes. L’adage est connu, “les États-Unis innovent, la Chine copie, l’UE fait les normes”. C’est ce côté impérialiste de l’UE qui est agaçant : vouloir conquérir le monde par sa vertu et ses soi-disant valeurs humanistes. Les faits sont têtus, l’UE veut du commerce, la libre concurrence et peu importe si cela doit passer par la destruction de ses propres outils de travail. L’industrie pollue, l’agriculture dénature les paysages, qu’à cela ne tienne, on fait faire le travail chez les autres. Dans le même temps, nos concurrents nous inondent de leurs produits que nous ne pouvons plus produire chez nous, exploitent nos idées et innovations que nous ne pouvons mettre en place faute d’autorisations. Et tout cela avec la complicité des pouvoirs publics.
“On marche sur la tête”…
Que l’on soit bien d’accord. Ce ne sont pas nos agriculteurs qui marchent sur la tête, mais nos gouvernants. Nationaux comme Européens. Prenons l’exemple du lait. La France était “terre de lait”, avec un savoir-faire d’exception. Depuis 2022, la production laitière est en baisse et les exploitations souffrent toujours plus sous les charges et normes. Expliquez-moi pourquoi alors passer des accords avec la Nouvelle-Zélande pour l’importation de lait en poudre ! Comme Janus, deux visages des gouvernants s’imposent : gardien de ce qui est MAIS le changement avant tout. Tout est dans l’esprit mercantiliste de cette Europe dont beaucoup s’éloignent.
et pourtant
J’ai pris l’exemple du lait, mais j’aurais tout autant pu prendre celui de la tomate, des pommes, de la volaille. C’est toute notre agriculture, de la vigne aux filières animales, qui est en danger et menacée. Ne soyons pas dupes, cette phrase inclue les hommes et les femmes qui travaillent très dur tout au long de l’année pour nourrir un pays qui n’en a cure. Que voulons-nous manger demain ? Des choses synthétiques appelées “viande”? En Indonésie, depuis plusieurs années c’est ce qu’il y a. Faute d’espaces et de terres agricoles, des décisions ont dû être prises pour nourrir la population tout en préservant cette autonomie stratégique. Mais nous, Français et Européens, nous avons une géographie extraordinaire et un climat encore avantageux. Il convient de protéger ce patrimoine, mais aussi ceux qui le cultivent pour nous nourrir et de rester le plus autonome possible sur la question de sécurité alimentaire.
Nous avons abandonné nos industries, des savoir-faire dont nous étions champions, n’allons pas sacrifier notre agriculture sur l’autel du mercantilisme européen éhonté !
Le Japon, 5è puissance spatiale ?
Samedi 20 janvier, le module SLIM (Smart Lander for Investigating Moon), engin non habité, s’est posé sur la Lune. L’alunissage fut d’une très grande précision, ce qui est remarquable pour ce genre d’exercice. Après deux premières tentatives en 2022 et 2023 qui s’étaient soldées par des échecs, la troisième fut la bonne. Dès lors, le Japon est la 5e nation à poser un engin sur la lune après les États-Unis, l’URSS, la Chine et l’Inde.
Objectif Lune
Le module SLIM est donc arrivé sans encombre sur la Lune après avoir orbité autour de l’astre Sélène depuis le mois de décembre. Cette opération très complexe avait pour but de déposer deux mini rovers, qui eux aussi ont été largués avec succès, et une sonde sphérique Sora-Q, pas plus grosse qu’une balle de tennis. Si nous devions relever une ombre au tableau, ce serait le problème des panneaux solaires. Ces derniers semblent avoir du mal à se déployer et par conséquent un défaut d’alimentation électrique pourrait venir compliquer le déroulé des expériences. Celles-ci sont consacrées à la recherche et l’analyse des roches afin de faire avancer l’exploration sur les ressources en eau. Cette question d’eau est primordiale pour qui veut installer une base “scientifique” sur cet astre, puisque bien que ce soit loin, ne perdons pas de vue que les États-Unis et la Chine ont ouvert la compétition à qui y arriverait le premier pour s’y installer.
Comme sur la Terre, de nouveaux pays se posent en “peer competitor” dans l’espace afin d’y asseoir une forme de puissance, voire de prestige. Comme le formulait le président Kennedy dans son discours à l’Université Rice en septembre 1962, les Américains ont “choisi d’aller sur la Lune (…) et d’accomplir d’autres choses encore, non pas parce que c’est facile, mais parce que justement c’est difficile, car se but servira à organiser et à donner le meilleur de nos énergies et de nos savoir-faire (…)“. Donc toute nation qui réussit dans l’espace acquiert une forme supplémentaire de puissance.
Enjeux stratégiques ou expression de puissance ?
En 2021, mon mémoire de Master en Relations internationales posait la question des enjeux stratégiques et sécuritaires dans l’Espace, et comment de nouvelles expressions de puissance s’y exprimaient entre les États-Unis, la Chine et la Russie. Aujourd’hui, en 2024, si la Russie est en partie hors-jeu, les enjeux sont toujours les mêmes avec des moyens technologiques toujours plus fantastiques. L’Espace est un lieu de connaissance et à ce titre les échecs valent autant que les réussites. On s’émerveille devant la réussite du Japon, et l’on va apprendre de la perte de l’alunisseur Peregrine de la Nasa avec la fusée Vulcan Centaur d’United Launch Alliance de Lockheed Martin et Boeing. Le Japon est dans la cour des grands. Reste à savoir si la polarisation et les jeux d’alliance qui sont en train de se mettre en place sur Terre vont se projeter dans l’Espace.
Taïwan, pour aller plus loin
Alors que viennent de se dérouler les élections présidentielles et législatives à Taïwan, et que nous observons la situation de loin, je vous recommande la série sur Arte de trois documentaires “Triades, la mafia chinoise à la conquête du monde“. Cela permet d’observer la situation avec un autre regard, mais surtout avec la prise en compte d’un acteur invisible.